Souvenirs C-I-L

ARTICLE PRINCIPAL et références


L’épopée C-I-L à McMasterville… un témoignage !
Souvenirs précis d’un octogénaire
😉  par Robert Lapointe  Novembre 2023

Introduction

Northvolt est devenu tout récemment propriétaire de l’énorme terrain industriel qu’occupait la Canadian Industries Limited (connu sous C-I-L) avant sa disparition. Ceci a ravivé mes souvenirs précis de la Canadian Industries Limited. J’écris pour ce présent texte, C-I-L par respect du nom de la marque en peinture et engrais C-I-L qui est demeuré à ce jour même si la compagnie n'existe plus ! 

Cet article fut apprécié par beaucoup de gens ainsi que par Northvolt. Voici une photo d'une réunion agréable avec Northvolt dans un resto café de Beloeil. Je suis à l'avant à droite et devant moi, monsieur Richard Pelletier, ancien conseiller municipal de Saint-Basile-Le-Grand et président de la Société d'histoire de Saint-Basile-Le-Grand et tout en avant, Martin Renaud, responsable de la Butte, maison des Jeunes de Saint-Basile-Le-Grand. Nous étions 5 en compagnie de Philippe Michaud de Northvolt au fond de la photo.

Vous constaterez à la fin de cet article que mon opinion sur le projet Northvolt Six a évolué et que je suis beaucoup plus perplexe et avec un enthousiasme vacillant au sujet des acteurs impliqués. 

Cette chronique vous décrira l’entreprise Canadian Industries Limited (C-I-L) de McMasterville autour des années 1965 à 1967. Ce sujet est parmi mes souvenirs inédits très personnels pour plusieurs raisons. Ces 3 années de ma vie, ici détaillées, font le sujet d’un seul paragraphe sur 20 de mon curriculum de randonnée de vie publié sur le présent site web.

C-I-L fut mon premier emploi permanent. Mon travail m’a permis de connaitre beaucoup de parties et composantes du complexe industriel de McMasterville. L'endroit est immense en terme bâtisses de différentes productions, de nombreux produits, de nombreux magasins bien barricadés d'entreposage avant expédition, des laboratoires d'assurance de qualité, etc. Je suis loin d'avoir tout vu et tout compris ! Lors de la rédaction de cet article, j'ai eu beaucoup d'aide de la part de Marc Robillard, un ex-employé C-I-L qui y a travaillé pendant dix ans. Surtout que c'est une personne qui est curieuse qui aime apprendre et comprendre !

J’ai à raconter diverses histoires vécues et des anecdotes inédites à propos de moi, de mes patrons, de collègues employés, de l’entreprise et de la région.

Vous y trouverez en plus à la fin d’excellents documents historiques en référence qui couvrent beaucoup les débuts de l’entreprise jusqu'à la fin de la 2e guerre mondiale ainsi que de 1975 à 2000. Comme mentionné, je compte couvrir surtout la période 1964 à 1966, mais je vais en plus commenter la grande explosion de 1975. 

Je couvre aussi une multitude de sujets dont : la fourniture d'explosifs à l'armée américaine lors de la guerre au Vietnam, l'explosion majeure de 1975, des plans aériens de l'usine, mon habitation chez les Leclair (première ferme cultivant les champs loués à la C-I-L), le réseau de rails C-I-L et du CN, des polluants, de la dangerosité des lieux et des processus et produits, etc.  

Et à la toute fin, la venue et le départ de l'armée canadienne découlant de la crise d'octobre 1970 et des mesures de guerre au Québec.

Sur cette mémorable époque, je décris l’évolution de la C-I-L menant à sa fermeture en 2000. Et je termine sur la description du terrain qui sera utilisé à partir de 2023 par Northvolt ainsi que quelques commentaires au sujet de ce projet.

Bonne lecture ...

Je débute en vous mentionnant que la municipalité de McMasterville fut fondée en 1917 et son nom est basé sur William McMaster, président de Canadian Explosives Limited (compagnie qui devient Canadian Industries Limited par la suite).

En entrée de jeu, je dois mentionner que tout ce qui reste aujourd'hui est un immense terrain industriel ainsi qu’une résidence privée pour retraités Les Richeloises qui fut rénovée et adaptée à partir de l’édifice du Centre de recherche canadien C-I-L. Cet immeuble du 701 chemin du Richelieu fait face au Richelieu et est sur un terrain adjacent au terrain de l'usine de production industrielle de la C-I-L. Le centre de recherche fut transféré en Ontario vers 1985 et l'immeuble devint un peu plus tard une résidence privée pour retraités.  

Ce centre de recherches construit en 1961, distinct de l'usine avait ses propres chercheurs et techniciens. Je me rappelle de deux amis techniciens du ERL (Explosives Research Laboratory) , Jean-Guy Roy et Bastarache qui en 1966 se sont ramassé les deux le même jour à l’hôpital bras et jambes cassés et leurs Corvettes démolies. Il semble que ce n’est pas seulement les explosifs qui les excitaient. 😉 Comme technicien au laboratoire de l’usine, j’ai eu quelques interactions de travail avec le Centre de recherche.

En 1964, j’abandonne mes études universitaires (j’y suis revenu plus tard) et après une entrevue avec le chef chimiste Feu Bill Waugh (1904-1987), j’obtiens un emploi permanent comme technicien de laboratoire au salaire de 400 $ par mois ! C-I-L cherchait de la relève aux vieux employés qu’ils avaient embauchés après la 2e guerre mondiale. On déroulait le tapis aux décrocheurs universitaires plus faciles à former.

Pour l’entrevue, je suis arrivé de Montréal via Autobus Provincial sur la 116 dont le chauffeur connaissait le raccourci où me déposer pour aller à la C-I-L (à peu près vis-à-vis où se trouve le restaurant Piment Szechuan de McMasterville) pour que j’emprunte un chemin non banalisé. 

Je devais traverser les rails de chemin de fer et poursuivre le sentier boisé le long du ruisseau Bernard menant près du centre de recherche près du Richelieu pour enfin me rendre à l’édifice principal de l’usine.

Pendant ma période d’emploi à la C-I-L je deviens le principal organisateur bénévole de l’Exposition scientifique annuelle de la Vallée-du-Richelieu pour les écoles de la Montérégie alors sous l’égide de la C-I-L. J’ai eu à collaborer avec le Dr Davidson du Centre de recherche C-I-L et Jean-Guy Roy, l'ami technicien. En plus d’organiser l’exposition, il fallait en plus solliciter le financement par les industries de la région, trouver des juges scientifiques et recevoir les candidatures des écoles. J’admets avoir été un peu dépassé pour mon âge à cette époque, mais la tâche fut réalisée.

Ci-dessous une vieille photo d'été 1964 de moi devant l'entrée de l'usine C-I-L sur le boulevard Richelieu à McMasterville. Je relevais un défi de jogging sans préparation vers 16 heures après le travail.

Une bonne partie de mes collègues de laboratoire ont fait des mises sur ma performance. Je devais courir aussi loin que le cortège d'automobiles le voulait, mais au minimum jusqu'aux limites de Saint-Bruno. Les employés de l'usine et les patrons se demandaient ce qui se passait en cet après-midi pluvieux devant l'entrée principale de l'usine.

Parmi les techniciens présents, je reconnais Cameron, Randy Lanctôt, Don Fenton, Jordan, Gendron et autres ainsi qu'au chronomètre Bill Dooley !

J'ai relevé le défi avec succès. Je suis arrivé au travail à l'heure le lendemain matin, mais avec les jambes droites et raides comme du fer.

Un employé de la C-I-L, Roland Provost vient de me transmettre cette image d'il y a 60 ans !!! J'avais 21 ans !!! WOW !




Il faut savoir qu'à cette époque, l'informatique dans l'usine de McMasterville, dans les bureaux administratifs de l'usine et dans les laboratoires était totalement inexistante. De même au siège social et les autres usines. La paye à McMasterville était faite à la mitaine et à l'aide de machines calculatrices électromécaniques. Les dépôts bancaires bihebdomadaires dans les comptes des employés à la Banque Nationale de McMasterville se faisait aussi manuellement. 

Un nouvel employé C-I-L entre 1967 et 1977, Marc Robillard dont je parle plus loin dans l'article, a travaillé à l'informatisation de la paye dans les usines. Marc est un personnage qui adorait comprendre en apprendre en se promenant partout ! De même par la suite il a contribué à l'optimisation de la production à l'aide de l'informatique dans les usines C-I-L

Au cours de la recherche et de la rédaction de cet article, j'ai eu le plaisir d'échanger avec des anciens employés C-I-L dont je parle plus loin, incluant Roland Provost, technicien et Jean Vinet, ingénieur et Jacques Lagassé, technicien ainsi que Ken Suddard, comptable et acheteur.
 

Dans l’ensemble du complexe de production et le laboratoire, la langue anglaise prévalait lors de réunion de sécurité. Le directeur de l’usine et le comptable étaient unilingues anglophones. De même pour mon bon patron Feu Bill Waugh (1904-1987) chef chimiste, un unilingue anglais. Quoique l’assistant de Bill, Feu Charles Cathro (Charlie) Hunter (1920-2015) parlait bien le français avec ses techniciens francophones.

Ci-dessous, vous voyez le bureau principal de l’usine au cours des années 60 (Collection Gilles Plante). Les laboratoires étaient au 1er étage à droite, là où j’ai eu ma première entrevue d’emploi et où j’ai travaillé.

  

Le bureau principal au cours des années 60   Collection Gilles Plante
 
Les bureaux administratifs étaient au 2e étage et le bureau du directeur de l’usine juste au-dessus d’une pièce ou je conduisais périodiquement des tests de qualité de la glycérine d’un échantillon d’une récente livraison de matière première. Le test se terminant par une petite portion d’explosif de nitroglycérine. Une fois, le test s’est mal conduit par une montée subite de la chaleur et j’ai dû appliquer une procédure technique d’urgence pour m’éloigner rapidement de la hotte, au cas où ! Le directeur de l’usine aurait pu se faire secouer et il ne l’a jamais su !
 
J’ai rencontré deux fois le directeur d’usine anglophone. Une fois après que j’ai signé, en deuxième sur une centaine de personnes, une pétition banale. L’initiateur Feu Don Fenton (1941-2011) et moi le 2e signataire avons eu droit à une réunion de remontrance du style Clarence Campbell si vous voyez ce que je veux dire ! La deuxième fois, c’est lorsque j’ai fait partie de son équipe de curling au tournoi des employés C-I-L à Brownsburg. Et nous avons heureusement gagné ! 😉. Plus tard, Alex Quenneville fut nommé directeur de l’usine CIL.

Il y a peine 1 an en 2022, lors d’une promenade près de chez moi, j’ai engagé la conversation avec monsieur Kenneth Ross Suddard, un nonagénaire actuellement de 96 ans, qui demeure sur la rue du Verger à Saint-Bruno-de-Montarville. Surprise, j’apprends de lui qu’il était un gestionnaire à la CIL et avait son bureau au 2e étage. Il s'est occupé jusqu'à sa retraite de gérer les matières premières pour les productions et par la suite fut acheteur pour l'usine. Que le monde est petit de se retrouver quelque 55 années plus tard ! 😉


 

Photo Collection Gilles Plante

Du côté gauche de l’édifice il y avait une entrée principale large pour l’entrée des camions et du personnel de l’usine elle-même. On ne voit pas ceci, mais il y avait une barrière pour les camions et un petit bâtiment guérite de gardiens où le personnel de l’usine devait entrer sous surveillance. Règle stricte, ne pas entrer avec des allumettes dans ses poches sinon vous perdiez votre emploi sur le champ. Fumage interdit dans l'usine !

À noter qu'il y avait plus loin le long du Richelieu une entrée sortie pour les camions contenants des produits explosifs et autres. Elle était localisée pas loin du quai Dynamite !

Nous les techniciens de laboratoire, entrions par la porte principale par le devant de l’édifice. Si nous devions travailler dans d’autres endroits dans l’usine alors il fallait passer par la guérite gardée par des agents de sécurité.

Le complexe industriel de McMasterville au milieu des années 60 avait délaissé la peinture C-I-L au profit de l’usine C-I-L de Valleyfield. Le complexe était composé de plusieurs installations différentes de production à partir de produits de base : les usines d’acide sulfurique, d’acide nitrique, de TNT (Trinitrotoluène), de nitroglycérine pour la dynamite, la production du PETN (Pentaerythritol tetranitrate), de la poudre noire pour les munitions préparées à Brownsburg, des engrais chimiques, etc. Il y avait une petite unité de production du produit AMEX contenant du PETN. Un peu plus tard après mon départ, une autre bâtisse appelé la Nitrone fut construite.

Il y avait deux quais de réception ou d'expédition sur la rivière Richelieu. Le premier, presque devant l'édifice administratif pouvait recevoir de la marchandise pour l'usine et le 2e plus loin était surnommé le quai dynamite. Sur le terrain il y avait un réseau ferroviaire privé C-I-L qui transportait les produits de production vers des magasins d'entreposage. Il y avait aussi un réseau CN sur le terrain C-I-L pour embarquer des produits de ces magasins pour acheminement à la clientèle en suivant le réseau extérieur longeant la route 116.

Lorsque requis, des spécialistes avec les autorités locales se servaient d'un quai comme point de départ pour placer quelques petites charges explosives lors de la formation de barrages de glace au printemps pouvant causer d’importantes inondations d’eau sur les rives du Richelieu.

J’ai travaillé au laboratoire de l’édifice principal C-I-L pour l’assurance de qualité de l’acide sulfurique, de l’acide nitrique, de la glycérine comme ingrédient de base pour la production de la nitroglycérine dans cette usine totalement automatisée.

Un produit instable à produire est la poudre noire et je n’aimais pas me promener dans ce coin du complexe. Le souffre, salpêtre et charbon de bois étaient mixés dans un grand contenant circulaire par des lames en bois pour éviter les flammèches pouvant causées explosion. Dans le passé, il y eu plusieurs explosions à la poudrière causant la mort.

Lors d’une visite à mes grands-parents Lapointe à Saint-Angèle-de-Monnoir, mon grand-père, homme de peu de mots, a laissé tomber soudainement « j’ai travaillé à la poudre noire à McMasterville vers 1910 » et il connaissait le danger constant de la poudre noire. Durant mon emploi à la C-I-L, il circulait à l’usine l’histoire d’une explosion avec 1 mort et un autre camarade employé ébranlé qui commençait son premier jour d’emploi à la poudre noire. Il serait parti à la course vers la sortie de l’usine et ne serait jamais revenu !

Il n’y a jamais eu à ma connaissance d’explosion à l’unité de production de nitroglycérine, ni du TNT ou de PETN. À l’époque, je rencontrais à l’occasion l’ingénieur principal C-I-L de Montréal qui visitait, inspectait et vérifiait les travaux. J’ai vu le plan de contingence en cas d’explosion majeure avec des scénarios sur plan qui montraient la distribution possible de différents débris projetés jusqu’au Mont-St-Hilaire.

Il y avait le laboratoire principal et aussi plusieurs petits laboratoires spécialisés à l’intérieur du complexe pour l’assurance de la qualité des explosifs et des engrais. Il y avait un inspecteur canadien qui venait vérifier mes résultats de tests sur le PETN et le TNT avant que les produits ne partent par camions pour les États-Unis et être remis à la défense américaine pour la guerre au Vietnam. Au milieu des années 60, ce contrat militaire était immense pour C-I-L ! Le PETN était un détonateur d'explosif effroyable placé dans les bombes, les obus et les roquettes et le TNT pour l’artillerie.

Il y avait un petit laboratoire satellite dans l’usine, mené par un technicien particulier sous la gouverne comme employé du chef chimiste Feu Bill Waugh (1904-1987). Ce laboratoire mesurait les caractéristiques des explosions de nitroglycérine et de divers explosifs. C’était Henry Heinz Wigand, un allemand ex-membre enrôlé vers 16 ans de la Panzer Division de l’armée allemande qui était solitaire et faisait un peu peur. Un jour, après avoir été cueillir à pied dans l'usine quatre échantillons au bâtiment de nitro avec Feu Gilles Leclerc (1942-1975) technicien, nous les avons apportés au laboratoire d'Henry. Je suis entré une seule fois dans cet antre technique pour assister à un test d’explosion. Ce fut impressionnant de porter à la chinoise sur mon dos, le long des rails du réseau privé, des petites bonbonnes de nitro ! En rétrospective, m'être enfargé aurait terminé ma vie car la nitro est un produit explosif susceptible au choc !

L’assistant au chef chimiste était Feu Charlie Hunter (1920-2015), un vétéran des troupes alliées. Je n’ai jamais vu Henry et Charlie jaser entre eux ! Les deux n’avaient pas de formation en chimie au préalable à leur emploi après la guerre. Je les inquiétais sûrement avec mes études et connaissances comme concurrent potentiel lors d’un départ éventuel à la retraite du chef chimiste.

Le chef chimiste Feu Bill Waugh (1904-1987) était un bon patron de foi religieuse bahaïsme et chef spirituel de la grande région. Je me souviens aussi de plusieurs amis techniciens dont Jacques Lagassé, Paul Durocher, Feu Gilles Leclair (1942-1975) et Feu Don Fenton (1941-2011). Et le bon souvenir de l'ésotérique Don qui m'invitait à son chalet en Estrie les fins de semaines. 

Sur le site C-I-L il y avait un vieux hangar qui abritait un vieux réservoir dont nous déversions les résidus des échantillons d’acides (acide sulfurique et acide nitrique) du laboratoire. Il fallait monter dans un haut escalier équipé d’un masque à gaz, des lunettes de sécurité et des gants de protection pour faire le déversement manuel.

J’ai aussi travaillé au laboratoire satellite des engrais chimiques et d’explosifs de l’unité de production du nitrate d’ammonium d’où j’ai assuré pendant 6 mois le « graveyard shift de minuit à 8h00 ». C’était un travail ennuyeux avec des heures qui déréglait mon mode de vie. Il y avait rotation chaque 3 mois des techniciens, mais un technicien étudiant pour l’été dont le père était un vice-président C-I-L a pu passer son tour et j’ai écopé d’un autre 3 mois consécutifs de « graveyard shift ».

J’ai compris un peu plus tard que ma fonction au Ammonium Nitrate était importante lorsqu'un autre technicien a fait un mauvais travail en somnolant et inventant des résultats de tests. La conséquence fut dramatique. Un wagon dont les granules d’engrais se sont durcis en un seul bloc au cours de la nuit ! Le mauvais taux d’humidité des granules d’engrais qui fut rapporté à toutes les heures aux opérateurs de l’unité de production a eu une conséquence désastreuse.

Une autre de mes fonctions à la C-I-L fut de prendre des mesures de la pollution dans l’usine et dans les environs. Je montais dans l’échelle du stack de la grande cheminée de l’unité de production de l’acide sulfurique pour prendre des échantillons d’air, de fumée et de gaz émis. Ceci en utilisant des instruments portables spécialisés. Je prenais aussi des mesures de la qualité de l’air le long des rails et de la 116 vis-à-vis du petit nombre de récentes habitations de l’époque à McMasterville.

Enfin, je mesurais la qualité de l’eau de divers petits et grands ruisseaux qui s’écoulaient vers le Richelieu. Au début, l’eau de la production de TNT était très rougeâtre et après que C-I-L ait appliqué des correctifs, l’eau est redevenue de couleur et de qualité, disons plus normale ! Tous les résultats étaient transmis à la maison mère C-I-L à Montréal sans que je reçoive de rétroactions ou de commentaires. Je n’analysais pas tout car je n’avais pas de spectromètre de masse.

À cette époque, j’étais jeune, célibataire et bon vivant inconscient osant traverser le Richelieu à pied sur la glace ou faire des passages interdits sur le pont des trains entre McMasterville et Otterburn Park pour aller jouer comme membre au club de curling d’Otterburn Park. À un moment donné à une occasion, j’ai dû me coucher par terre entre les deux voies pour laisser passer les deux trains de directions opposées ! Ces prouesses dangereuses cessèrent lorsque j’acquis ma petite VW coccinelle pour 300 $ payable à 100 $ par mois. 😉 Une époque de mes folies du samedi soir. 😉 Et l’hiver, dès vendredi 17 h00 je quittais McMasterville pour la fin de semaine avec ma coccinelle pour le camp d’hiver loué avec des amis (Pierre Richard, Claude Leblanc et Philippe Palmieri) de Lachine pour la saison ski au Mont-Tremblant.

Je vous raconte une anecdote particulière à titre de victime d’empoisonnement chimique à la C-I-L. Il faut aussi savoir que peu de temps avant mon arrivée comme employé, il y eut un autre technicien de laboratoire C-I-L lui aussi nommé Lapointe qui fut atteint d’un empoissonnement chimique se traduisant par de violents maux de tête et le tout de termina par son décès.

Moi, le 2e Lapointe, j’ai enduré pendant un mois de violents maux de tête. Je prenais 4 aspirines par 6 heures, me cachais le jour pendant la journée de travail dans le fond du laboratoire avec un patron se demandait quoi faire avec moi. J’ai consulté des médecins (pas ceux de la compagnie) qui m’ont fait passer des tests sans rien trouver. Au laboratoire nous étions tous exposés à de nombreux produits chimiques pour conduire nos tests. Après un mois, je n’en pouvais plus. Un vendredi soir je suis allé me saouler de beaucoup de double dry gin au populaire et bruyant hôtel Central de Beloeil. Une grosse brosse ! Le lendemain, le samedi matin, à mon éveil tous mes maux de tête étaient disparus. Je me serais rincé le cerveau ! 😉 Et le 2e Lapointe (moi !) n’est pas décédé et continua son emploi à la C-I-L.

Une belle journée du printemps au laboratoire C-I-L, j’observe d’une fenêtre de l’arrière du laboratoire des travaux d’enlèvement et de remplacement dans un grand réservoir circulaire de granules de Vanadium, un catalyseur chimique extrêmement toxique. Ce travail de remplacement était très rare et je fus formé par Dr Davidson du Centre de recherche C-I-L sur la nouvelle méthode de test de la qualité de ce Vanadium neuf. Ma principale surprise fut de constater l’embauche temporaire d’étudiants pour ce travail que je considère toxique et dangereux. Et le chef chimiste et son assistant étaient sur place dans le laboratoire. 

Quelques jours plus tard, sur instruction du Dr. Davidson du centre de recherche, j’ai fait des tests et analyses sur des échantillons de Vanadium au laboratoire de l’usine et au centre de recherche.


La maison habitée par les Leclair dans les années 60 
3 chemin du Richelieu Saint-Basile-Le-Grand
Photo 2023 de la maison construite en 1880 (Photo RL)
+ Photo de la pierre tombale des Leclair (Photo RL)
+ Photo des années 60 (Collection André Leclair) Photo extraite de livre de Richard Pelletier. 
« Saint-Basile-le-Grand, ses racines agricoles » Voir plus loin dans la partie des références.

Cette maison de nature patrimoniale fut récemment acquise en 2024 par Northvolt pour en faire un lieu de rencontre hors du site industriel officiel.

Imagettes cliquables et images zoomables !
 
Au milieu des années 60, l'immense terrain de C-I-L se prolongeaient vers Saint-Basile-Le-Grand. Plus près de la 116, il y avait un grand nombre de petits magasins bien barricadés et sécurisés pour l’entreposage d’explosifs. Et vis-à-vis près du Richelieu à Saint-Basile-Le-Grand il y avait des maisons de cultivateurs dont celle occupée en 1960 par les Leclair. La C-I-L louait une partie des champs à Monsieur Leclair pour l'agriculture et élevage de bétails. Plus tard le fils André Leclair devint propriétaire d'un lot distinct occupé par la maison et une remise. Les bâtiments de ferme furent démolis à un moment donné. 

Un des fils, Feu Gilles Leclair (1942-1975), était mon collègue de travail à la C-I-L. Il m’invita à devenir chambreur à la ferme de Paul Leclair. L'épouse de Paul, Claire McDuff Leclair se sentait en sécurité d’avoir un chambreur travaillant la nuit, mais présent dans la maison le jour. Car le jour le père Leclair et son fils André travaillaient loin dans les champs ou à l’étable. La voie d’accès pour la maison isolée du 3 chemin du Richelieu de Saint-Basile-Le-Grand était via le chemin le de la rivière Richelieu. Pour vous situer en partant de l’édifice principal de l'usine, il y avait la station Power House C-I-L qui produisait de la vapeur d'eau pour chauffer les bâtisses de l'usine, ensuite les équipements de lignes électriques Hydro-Québec et un mille plus loin en direction ouest le long de la rivière sur le chemin Richelieu on arrivait au chemin d’accès à la maison des Leclair. Première maison sur chemin Richelieu de McMasterville. Je fus traité presque comme un fils par les Leclair !

Gilles était un beau bonhomme brillant. Il roulait en auto sport décapotable MG. Il n'avait plus d'odorat et perdu le sens du goût suite à un accident avec sa Harley. 

Gilles (frère d'André) s'est marié avec sa magnifique Lisette Savaria en 1967. Lisette est une artiste internationale connue dans les arts de la sculpture et a travaillé avec Jordi Bonet. 

Gilles décéda le 3 octobre 1975 d'un cancer, rien à voir avec l'explosion C-I-L du 1er octobre 1975 ! 

Dans la seconde image ci-haut il y a la pierre tombale de la famille Leclair dans le cimetière de la paroisse catholique de Saint-Basile-Le-Grand. (photo que j'ai prise moi-même lorsque j'ai photographié tous les monuments du cimetière et les ai remises à la Société d'histoire de Saint-Basile-Le-Grand.

Il existe une autre photo des années 60 de la ferme, dont le toit était gris et noir, et qui fut colorié vert ! On y aperçoit les bâtiments de ferme. Photo de la collection André Leclair.

Paul Leclair habitait la maison historique des Brouillet dit Bernard. Paul Leclair était un rentier agriculteur et gentleman farmer. Il fit carrière comme bijoutier. Il s'intéressait à l'élevage et l'agriculture et partageait cette passion avec son fils André.

Il y avait aussi tout près dans la région une autre famille Leclair ou Leclerc qui n'a rien à voir avec la famille Leclair du 3 chemin du Richelieu. Il y a beaucoup d'histoire entourant cet autre Leclair, les Clément, les fromages de Madame Clément et une entreprise de laiterie. Ceci vaut la peine de lire l’histoire de la laiterie R.A.Clément .

La maison de ferme du 3 chemin Richelieu de Saint-Basile-Le-Grand, datant 1880, est en ce moment en 2023 la propriété de Gabrielle Haché et Jeremy Lapointe (aucun lien familial direct avec moi) sous les lots rénovés 3080235 et 3080240 (de l'ancien lot 8-1 de la paroisse de Saint-Joseph-de-Chambly du comté de Chambly). Ceci suite à la vente par André Leclair et sa conjointe Christiane Laplante.

Mme Haché m'a reçu pour une visite en novembre 2023. Rempli de souvenirs, j'ai reconnu la maison et les pièces à l'intérieur. Le vieil hangar en arrière de la maison était toujours là mais l'étable d'élevage du bétail n'existait plus. Je me souviens d'avoir vu un veau naissant réussir à se lever sur pattes en moins de 30 minutes après sa naissance !

Tout récemment en 2024, Northvolt a acquis la propriété du couple Haché Lapointe.



Mesures de guerre - Octobre 1970 à la C-I-L

Photo : Marc Robillard

Suite à l'enlèvement du diplomate Richard Cross le 5 octobre 1970 et de l'enlèvement du vice-premier ministre du Québec Pierre Laporte le 16 octobre 1970 (décédé le 17 octobre 1970), le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec mettent en place l'application de certaines dispositions de la Loi sur les mesures de guerre.

À la demande du gouvernement du Québec et de la Sûreté du Québec, l'armée canadienne est dépêchée au Québec.

Les soldats s'installent dans Montréal et notamment devant les portes de la Société Radio-Canada alors sur Dorchester (devenu plus tard René-Lévesque) entre les rue Guy et Mackay. Mon épouse pour entrer à son travail à Radio-Canada devait passer entre les soldats armés. Mais l'armée s'installa a beaucoup d'endroits jugés importants dont dans la région de McMasterville, Beloeil et Saint-Basile-Le-Grand et tout particulièrement à l'usine C-I-L de Mc Masterville et ses centres de recherche.

Comme l'explique Marc Robillard, un employé C-I-L d'alors : "quand j'entrais travaillé à la C-I-L, j'étais accueilli par des soldats armés. Sur certains bâtiments, il y avait des soldats avec des mitrailleuses. Dans un plant d’explosifs, je trouvais que ce n'était pas une bonne idée de positionner des soldats avec mitrailleuses dans l'usine elle-même à partir des toits des bâtiments car une balle perdue pouvait amener une catastrophe". Mais enfin...

Après inspection de l'usine et du terrain, l'armée a exigé que C-I-L remplace la très vieille clôture autour du terrain par une nouvelle et qu'un chemin soit construit le long de la clôture pour la circulation de patrouilles en jeep militaire.

En plus de surveiller l'usine et les centres de recherche, il y avait surveillance sur les chemins publics qui entoure l'endroit dans les villes de Beloeil, Saint-Basile-le-Grand et McMasterville : route 116 (Sir-Wilfrid-Laurier), montée Robert, chemin du Richelieu et la rue Bernard-Pilon de Beloeil.

Il faut penser que les mêmes mesures furent prises pour les usine C-I-L de Valleyfield et Browsburg !
 
La crise d'octobre s'est terminé le 28 décembre 1970 après la capture des 3 dernières personnes impliquées et recherchées soit Paul Rose, Jacques Rose et Francis Simard. 

L'armée canadienne a passé environ 3 mois à l'usine de McMasterville. Elle a quitté en janvier 1971. Après la crise, le directeur de l’usine, Alex Quenneville, a réuni des membres de son équipe et les soldats pour les remercier dans le Change House de l'usine. La photo ci-haut montre le départ des soldats de l’usine au son de la cornemuse. Photo rare du départ des soldats prise par Marc Robillard.

Note  : J'ai eu dans le passé à faire des zigzags entre les soldats avec mitraillettes pour entrer à mon hôtel Camino Real au centre-ville de Mexico. J'étais en voyage d'affaires et les soldats peu sympathiques faisaient la garde lors d'une réunion entre le président du Nicaragua et le président du Mexique. Et le lendemain, j'ai dû montrer pattes blanches aux deux gardes armées qui surveillaient l'entrée d'une banque avec des mitraillettes ! Des gens beaucoup moins sympathiques que l'armée canadienne. 


Explosion 1975

Avec permission : photo de Marc Robillard

Explosion à la C-I-L en 1975

J’ai quitté C-I-L en 1967 pour un emploi à l'école Polytechnique de Montréal que j'ai aussi quitté en 1969 pour compléter mon baccalauréat es Sciences en physique en 1971.

En 1975, j’étais marié et j'habitais Otterburn Park. Lors de l’explosion de 1975 à la C-I-L en début de soirée, notre maison et nos fenêtres ont tremblé. Il y eu 8 morts dans la bâtisse Nitrone produisant des mix explosifs.

J’ai récemment pris contact avec monsieur Marc Robillard, un employé de la C-I-L entre 1967 et 1977. Habitant Beloeil à l'époque, Il commença en 1967 comme étudiant d’été pour ensuite y poursuivre son emploi à la C-I-L à différents endroits dont McMasterville et Montréal. Il y eut différentes tâches et responsabilités importantes en informatique dont le projet d’informatisation de la paye pour plusieurs usines.

Lors de l’explosion à 19 h47 le 1er octobre 1975, il se rendit sur les bords du Richelieu du côté d’Otterburn Park pour y prendre des photos remarquables de l’explosion à la Nitrone. Vous pouvez y lire son récit Explosion à la C-I-L. La production du produit PowerMax 500 (un composé chimique substitut à la nitroglycérine) fut interrompue.

Pendant une partie de la soirée, les pompiers craignent que l'incendie causé par la déflagration ne rejoigne des wagons remplis de dynamite entreposés sur le site de l'usine. Des artificiers de l'armée, habillés de vêtements d'amiante, empêchent que ce dépôt d'explosifs soit atteint par le feu. Une fois le calme revenu, des policiers et des secouristes ratissent le secteur de l'usine à la recherche de survivants.

Le Soleil de Québec publia un compte rendu précis. Des 13 travailleurs qui se trouvaient dans le bâtiment au moment de l’explosion, 8 sont morts. Ils dont cités dans Explosion à la C-I-L.

  • Gérald Beauregard, 29 ans, marié, un enfant
  • Alain Bédard, 20 ans, célibataire
  • Pierre Bernier, 26 ans, marié, un enfant
  • Gérard Caron, 27 ans, marié
  • Pierre Fournier, 19 ans, célibataire
  • Pierre Lévesque, 21 ans, célibataire
  • Jean Ouellette, 45 ans, marié, trois enfants
  • Edgar Racine, 47 ans, marié, quatre enfants

Parmi les accidents industriels majeurs au Québec rapportés le 9 novembre 2012 dans le Journal de Montréal sous le titre Il suffit d'une étincelle,  il y a celle du 1er octobre 1975. L’usine d’explosifs CIL de McMasterville explose. L’onde de choc est ressentie sur 8 km. L’explosion blesse sept ouvriers et happe mortellement huit autres. Treize ans plus tard, une autre explosion entraîne la mort de quatre employés et fait deux blessés. L’usine est finalement mise hors d’état de nuire en 1999 par l’Imperial Chemicals Industries Canada.

Il y eu en 1987 une autre explosion à McMasterville dans une unité de recherche faisant 4 morts et 2 blessés. Ceci arriva dans une usine pilote RE-22 pour fabriquer en petites quantités des émulsions moins explosives. Un accident malheureux par un employé ayant utilisé une mauvaise huile du moteur de la machine causant une surchauffe. " Ce serait le frottement et l’échauffement du produit comprimé dans une pompe qui a provoqué l’explosion " dit Jean Vinet, chercheur, concepteur et directeur de projet de ce nouveau processus.

Le chimiste John Kingston, 40 ans, et les trois techniciens, Danny Talbot, 26 ans, Bernard Lemay, 30 ans, et André Noël, 46 ans, sont décédés à la suite de polytraumatismes accidentels. Il y eu 2 blessés : Jacques Riendeau et Danny Kilcullen.

Peu de temps après, une usine complète fut construite avec succès au coût de 8 millions $ dans la partie forêt de l’usine vis-à-vis l’unité de nitroglycérine. Le processus manufacturait de façon automatisée et continue des nouveaux produits d’émulsion allant jusqu’à la mise en boîte automatique des explosifs notamment le Magnafrac. Ce genre de produits remplaça graduellement les produits à base de nitroglycérine. Les nouveaux produits étaient à base de nitrates.

Plus tard, C-I-L démonta graduellement toutes les installations et quitta McMasterville au début 2000.



Collection Gilles Plante
Photo fin des années 60 d'une petite partie de l'usine C-I-L le long du chemin Richelieu vis-à-vis les quais.       Cliquez pour zoomer !

La flèche pointe sur le 1er premier quai surtout à recevoir des marchandises (ce n'est pas le 2e quai DYNAMITE). L'immeuble administratif principal n'est pas sur cette photo car elle est un peu plus loin vers la gauche ! Une petite partie des installations !  

L'usine de production comptait environ 200 petits, moyens et gros bâtiments où l'on fabriquait et entreposait près de 400 produits différents. Un bâtiment important était le Power House qui produisait de la vapeur pour chauffer par temps froid les autres bâtiments. Des tuyaux aériens de vapeur quadrillaient l'usine. Il y avait aussi le Change House pour que les employés puissent endosser leurs habits de travail et placer leurs vêtements dans leurs casiers. Aussi, une place pour manger et se reposer. 

Les installations de production et de stockage étaient éloignées entre elles pour des raisons de sécurité. Il y avait un nombre limité de travailleurs devant être respecté dans chaque endroit.

Une fois produit, les explosifs étaient transportés par réseau ferroviaire privé C-I-L vers de petits magasins d'entreposage les champs. Il y avait beaucoup de petits magasins !

Il y avait aussi sur le terrain C-I-L un réseau ferroviaire CN séparé qui embarquait les produits commandés pour les acheminer à la clientèle. Dans certains cas, les transports se faisait par camions comme le furent les livraisons de TNT à l'armée américaine.  Les exploitants des carrières et les constructeurs du métro de Montréal étaient parmi les clients typiques. La goélette Saint-André au quai surnommée DYNAMITE pouvait être aussi utilisée.

L'unité de production de nitroglycérine opérait en mode automatisé et quasi continu avec la machine Biazzi provenant d'Italie. Cette machine était installée au 2e étage et la nitro produite par ce processus continu coulait vers le bas par gravité par une tuyauterie adaptée afin de ne pas créer d'éclaboussures pouvant mener à une explosion. Cette nitro liquide était sensible ! Il fallait rapidement la mixer notamment de la cellulose et la rendre gélatineuse pour en faire de la dynamite. 

L'unité opérait avec une très petite équipe de travailleurs qui savait que le non-respect des strictes procédures pouvait mener à la mort certaine de l'équipe. Tout outil de travail était fabriqué soit en bois ou en bronze. Une odeur dans l'endroit pouvait causer des maux de tête à certains travailleurs. Le cas échéant, les travailleurs pouvaient obtenir l'aide et suivi du médecin et de l'infirmière de l'usine ! La plupart du temps 2 aspirines réglaient le cas. Le salaire était très bon pour ces travailleurs manuels de l'époque qui demeuraient en poste longtemps.


Deux photos prises par Marc Robillard en 1972 sur la fabrication de la nitro et des produits explosifs.

Cliquez et zoomez !


Photo 1 -  La machine Biazzi, tout en acier inoxydable qui sert à fabriquer la nitroglycérine.  L'acide nitrique et la glycérine entraient dans l'appareil et réagissaient.  Défi majeur : ne pas dépasser la température maximum (je crois que c'était 80 degrés F).  Impossible de pomper le produit fini, trop sensible. Il doit descendre par gravité vers la bâtisse d'entreposage à quelques centaines de mètres.

Aucun employé ne travaillait dans cette bâtisse dont les murs à la base ont 12 pieds d'épais; les employés qui surveillaient le processus travaillaient dans un bunker en béton à plusieurs mètres de la bâtisse.  Pour l'entretien, on arrêtait le processus.  Les visiteurs n'étaient pas ad mis.  Marc a eu une permission très spéciale pour aller visiter le site et prendre des photos.

Photo 2 - Quand il était temps de mélanger la nitro avec des produits secs, un employé allait chercher la nitro à l'entrepôt et la transportait dans un long couloir vers la bâtisse dédiée au mélange.  Ci-dessous, le chariot avec des roues de Ford Modèle T (c 1920).  Dessus, deux réservoirs en plomb avec deux tuyaux pour vider par gravité la nitro dans le mélangeur.  Ensuite on retournait au réservoir et on commençait, 8 heures par jour, 5 jours par semaine.

 

Plan aérien 1 annoté

Plan aérien 2 annoté

Les Richeloises
Photo Robert Lapointe

Tout récemment en 2023, j’ai pris contact avec mon ami technicien Jacques Lagassé de Beloeil, un retraité 1998 de C-I-L pour se remémorer cette époque où nous furent pendant un court temps des colocataires à Beloeil et tous deux des employés à la C-I-L. 

Jacques et moi avons travaillé ensemble au laboratoire de l’usine. Plus tard, Jacques travailla de 1972 à 1999 dans les laboratoires de recherches dont le S98, le ERL (Explosives Research Laboratory) et le CRL (Centre de recherche) de la C-I-L. En fait, la partie centres de recherche était composé de plusieurs bâtiments dont le S98, le ERL et le CRL l'édifice principal. 

Jacques y prit sa retraite en 1998 mais fut rappelé de 1998 à 1999 pour des fonctions reliées au démantèlement de l’usine et des édifices de recherche. 

En 1981, la CIL déménagea son siège social de Montréal vers Toronto. 

Le laboratoire central de recherche (CRL C-I-L Research Laboratory) fut transféré de McMasterville à Mississauga vers 1985. 

L’usine et 2 édifices de recherche furent démantelés graduellement avec fermeture finale en décembre 1999. Quant à l'édifice principale CRL, COGIR acheta l'immeuble pour le convertir en maison de retraite privé Les Richeloises.

Depuis 1988, la compagnie C-I-L n’était qu’une filiale de la britannique de produits chimiques ICI (elle-même acquise en 2008 par la compagnie hollandaise AkzoNobel).

En 2012, la société américaine PPG acheta d’AkzoNobel la division de production de revêtements et de peintures – et, par la même occasion, la marque de peinture si bien connue C-I-L, qui existe encore de nos jours.

Le grand terrain industriel C-I-L de McMasterville et Saint-Basile-Le-Grand fut acquis par un groupe local de promoteurs : Serge Gariepy, Alice Wu et le multimillionnaire québécois Luc Poirier connu pour avoir vendu des terres de l'Île Charron au Gouvernement du Québec. Ces promoteurs préparaient un projet à long terme pour du développement résidentiel avec le soutien de la municipalité Saint-Basile-Le-Grand. 

Avec l'imprévu projet Northvolt, les promoteurs ont touché le gros lot ! Ils ont payé quelques 20 millions $ vers 2015 pour le revendre en 2023 pour quelques 240 millions $ sans avoir à construire. Ce même trio est aussi impliqué dans la propriété de plusieurs grands lots le long du chemin Sabourin à Saint-Bruno-de-Montarville. Ces promoteurs ont les poches profondes et la patience nécessaire pour des projets de risque à long terme.

Maintenant en 2023, Northvolt se pointe à grand galop avec son immense projet industriel privilégié par le Gouvernement du Québec. Cette société est maintenant propriétaire du terrain. 



Oui c'est un projet aventureux et risqué autant sur différents plans : technologique, financier et commercial.

Un défi à relevé ? 

L'usine sera construite sur un immense terrain localisé dans McMasterville et Saint-Basile-Le-Grand. Contour rouge sur l'image zoomable. 

L'usine elle-même s'étendra dans les 2 municipalités mais principalement à Saint-Basile-Le-Grand. La ligne pointillée en bleu délimite les territoires municipaux.

Selon un article de recherche par Le Devoir, le terrain de la zone délimitée en rouge fut réhabilitée aux valeurs limites réglementaires. Mais pour le reste 

Il reste à décontaminer éventuellement la zone dite scellée et à surveiller la zone contaminée hors zone rouge du côté est vers McMasterville qui se termine juste avant les stationnements de la gare de McMasterville et Les Richeloises. Cette zone, dite contaminée, est jugée scellée et sans écoulement vers la rivière Richelieu par les autorités, reste à voir ! 

Le ministère de l'environnement et Northvolt ont des actions à assurer et des devoirs à faire face au ruissellement souterrain et aux ruisseaux qui serpentent le terrain. Le directeur général du Comité de concertation et de valorisation du bassin de la rivière Richelieu COVABAR, Sylvain Lapointe pose de bonnes questions sans avoir obtenu des réponses complètes et peu de rapports écrits. 

Cet endroit était planifié avant ce projet pour un immense développement résidentiel sur un terrain historiquement exploité par une usine dangereuse et une partie tampon affectée à l'agriculture. Au moins il n'y a plus de production d'explosifs en milieu urbain !

Personnellement j’ai une opinion plutôt positive sur ce projet malgré les inconvénients. Il est bien normal que ce projet soulève les passions et engendre des débats. Il est sain de questionner et suivre à la trace ce projet et les promesses faites. 

Robert Lapointe

Voici quelques références historiques que vous pouvez lire :

https://www.youtube.com/watch?v=iX2WP4HfXOs
Une vidéo de Jean-Pierre Charbonneau sur le C-I-L

https://www.mcmasterville.ca/wp-content/uploads/2019/11/McMasterville-dhier-a-aujourdhui.pdf
Cahier d’histoire no 93 Octobre 2010 de la Société d’histoire de Beloeil-Mont-Saint-Hilaire
McMasterville d’hier à aujourd’hui et le parc commémoratif

par Paul-Henri Hudon

par Richard Pelletier
C-I-L : L’histoire derrière la marque

https://mshdautrefois.wordpress.com/2020/12/06/explosion-a-mcmasterville-1975/
Explosion de 1975
Le Bulletin hebdomadaire

Le Devoir

Au coeur de la Vallée du Richelieu   McMasterville 100 ans d'histoire !
par Pierre Lambert  Livre papier

Quelques 48 vieilles photos C-I-L avec commentaires

Facebook : 22 photos C-I-L de Marc Robillard
Incluant : l'armée quittant l'usine en 1970

BAnQ Numérique
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